Séminaire de la finance sociale à Lyon - juin 2005

, par Jean-Sébastien Zippert

Les 2 et 3 juin 2005 s’est déroulé à Lyon le séminaire annuel organisé par l’association INAISE (INternational AssocIation of Social financE organisations) qui regroupe les banques, coopératives et asbl actives dans la finance sociale au niveau international.

Cet événement est ainsi l’unique occasion pour etika de s’échanger avec ses homologues étrangers (principalement européens) sur les pratiques fructueuses mises en place dans chaque pays pour promouvoir l’investissement socialement responsable et donner une meilleure visibilité à ces investissements au niveau politique. Pendant 2 jours, nous avons pu travailler sur le développement de » nouvelles perspectives pour les finances sociales et solidaires ».

Les nouveaux facteurs de richesse par Patrick Viveret

Résolument placé sous le signe des valeurs profondes de l’économie sociale, le congrès a débuté par l’intervention de Patrick Viveret, qui est à la fois philosophe et haut fonctionnaire à Paris. Patrick Viveret a été rapporteur de la mission » Nouveaux facteurs de richesses » pour le gouvernement français. Dénonçant le fondamentalisme de marché et un rapport à la monnaie destructeur, Patrick Viveret marque la différence entre libéralisme et capitalisme autoritaire et reconnaît à l’économie sociale un rôle majeur pour servir un développement respectueux des êtres humains et de la planète. Il a ainsi clairement remis en cause les critères exclusivement économiques définissant le développement d’une nation comme le PIB (Produit Intérieur Brut) et sa fameuse croissance qui tient en compte les coûts induits par pollutions et destructions, générés par une économie qui privilégie systématiquement une concurrence » libre et non faussée ». Il a enfin fait un état des lieux des nouveaux indicateurs de développement prenant en compte la qualité de vie des êtres humains dans un pays dont l’espérance de vie des humains à la naissance, leur taux de scolarisation, le taux de participation des femmes à la vie économique, sociale et politique, les inégalités entre les habitants, etc…
La mise en pratique de ces indicateurs dans les pays industrialisés montre bien que si le PIB n’a cessé de croître, le bien être de ces pays s’est considérablement dégradé ces dernières années.

De gauche à droite : Patrick Viveret, Giovanni Acquati (président d’INAISE) et Jacky Blanc (président de la Nef)
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Le microcrédit, un outil à part dans la finance sociale

Dans le contexte de 2005, déclarée année du microcrédit par les Nations Unies, le congrès a laissé une large place au travail collectif sur les perspectives de développement d’un outil de lutte contre les exclusions qui a fait ses preuves. A l’occasion d’une table ronde réunissant 4 têtes de réseaux internationaux, les participants se sont attachés à définir quels étaient les défis pour l’avenir. Recherchant un rendement social plutôt qu’économique, les orateurs de la table ronde ont souligné que la principale difficulté des institutions de microfinance est de trouver des moyens de financer l’accompagnement des emprunteurs, facteur clé de succès pour un bon taux de remboursement. Ils ont également insisté pour que cette gamme de services s’étende au niveau de l’assurance et de l’épargne pour un meilleur impact.

Former les dirigeants des banques sociales

Les organismes de la finance sociale sont aussi variés que nombreux ! Qu’ils existent sous la forme de structures associatives ou de fondations à but non lucratif (comme etika), de coopératives, de clubs d’investisseurs, de sociétés financières ou de banques de plein exercice, chaque acteur d’un pays à l’autre exerce son activité en fonction des réglementations en vigueur et des moyens financiers et humains en place. Malgré la diversité des situations, la plupart de ces organismes doivent s’appuyer sur un réseau bancaire traditionnel et ils sont confrontés aux mêmes enjeux : travailler ensemble pour exister tout en gardant autonomie et identité propre. Portant un regard différent de celui de leur partenaire sur les fondements de l’idée de la banque, les questions qui motivent l’action des financeurs solidaires sont celles du rôle de l’argent dans la société, de la justification du taux d’intérêt ou encore de la création de liens de proximité entre épargnants et emprunteurs.

Former les dirigeants des banques sociales

Nous avons porté une attention particulière à la question de la formation des cadres et dirigeants des banques sociales. Julian Kühn est l’initiateur d’un projet pour la formation et la recherche sur la finance sociale mondiale et la création d’un cursus d’universitaire international. Ce programme qui permettrait une mutualisation des expériences dans le but de les partager et de les développer pourrait démarrer dès l’année 2006. L’objectif de cette université est de permettre l’entrée, dans le domaine de la finance et de l’économie, de personnes à la fois porteuses de convictions profondes mais aussi qualifiées sur les métiers bancaires pour évaluer au mieux les risques et trouver les meilleurs financements des projets à caractères sociaux et environnementaux.

Vous trouverez plus d’informations sur le site de INAISE.

Texte rédigé sur base d’un article paru dans la lettre de la Nef, société coopérative financière française qui a accueilli les participants à Lyon.