La finance (pas vraiment) verte

, par Ekkehart Schmidt














Pour son seizième rapport sur l’ISR, paru en juin 2021, l’asbl belge Financité cherche à délimiter le marché actuel des produits financiers dits socialement responsables. En 2020, l’encours total placé sur les produits appelés éthiques, durables ou responsables s’élève à 104,77 milliards d’euros. Il a connu une hausse encore plus spectaculaire que les années précédentes (+48,74 milliards d’euros).

La part de marché de l’investissement socialement responsable a elle aussi atteint un sommet historique de 12,2 % en 2020 contre 6,9 % en 2019 (soit le niveau le plus élevé jamais atteint). Ceci est dû à l’importante embellie notée pour les fonds ISR. Cependant, la transparence de ces produits financiers autoproclamés « socialement responsables » pose réellement question. Lire le rapport ici

Quelques jours avant, le 21 juin, Greenpeace Luxembourg en collaboration avec Greenpeace Suisse a dévoilé après un long travail d’enquête une nouvelle étude sur 51 fonds dits "durables" disponibles au Luxembourg et en Suisse.

Les résultats ? "Les fonds durables en question ont à peine réussi à rediriger plus de capitaux vers une économie durable que les fonds conventionnels.

Cela veut dire que, non seulement ils ne contribuent en rien à la lutte contre la crise climatique, mais en plus ils trompent les investisseurs qui souhaitent investir leur argent dans des projets durables."

Le résumé des auteurs est clair : "Proposer aux client·es des produits financiers ’verts’ qui ne sont pas réellement durables, c’est du greenwashing. Et comment est-ce possible ? Et bien c’est malheureusement très simple : les fonds de durabilité ne sont pas tenus d’avoir un impact positif mesurable, même si leur titre implique clairement un impact durable ou ESG !"

En conséquence, Martina Holbach, chargée de campagne Climat & Finance chez Greenpeace Luxembourg, demande : "Les fonds d’investissement durables doivent permettre de réduire les émissions climaticides et de canaliser efficacement l’argent vers des changements structurels dans l’économie réelle. Greenpeace appelle les responsables politiques à mettre en place un cadre réglementaire contraignant pour promouvoir une véritable durabilité sur les marchés financiers. Entre autre, les fonds d’investissement dits durables ne doivent investir que dans des activités économiques dont la trajectoire de réduction des émissions est compatible avec les objectifs climatiques de l’accord de Paris." Découvrir le résumé du rapport

Les centres financiers tels que le Luxembourg peuvent jouer un rôle crucial dans la protection du climat et dans le développement durable - mais seulement s’ils renoncent au greenwashing en faveur de produits financiers durables légitimes. Il nous faut une finance qui mise sur un avenir viable, une finance au service de la société et tenant compte des ressources limitées de la planète.

Grâce à l’expertise de Greenpeace, nous pouvons tirer la sonnette d’alarme et demander au secteur financier de protéger -vraiment- le climat. Le problème n’est pas nouveau. etika a sorti en 2009 la deuxième édition de son guide des placements socialement responsables dont la première édition avait connu un excellent accueil en 2007. Lire plus ici

Réactions : Lire ici des textes sur cette étude dans la "woxx" (en allemand) et dans le paperjam (en français).

Article du 29 juin 2021